Prison

Editeur : La Boîte à bulles
Auteur : Fabrice Rinaudo
Co-auteurs :
  • Sylvain Dorange
  • Anne Royant

EAN : 9782849534458
Prix : 18 €
Collation : 80p. ; 22cm x 30cm ; illustrations en couleur
Date de parution : 12/10/2022

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Quatre contes cruels qui nous plongent sans détour dans le milieu carcéral français avec toute sa violence, son absurdité et son (in)humanité.

Bienvenue en prison. Ici, le sable du temps s’écoule plus lentement qu’à l’extérieur. Les grains doivent être plus gros.

Guy partage sa cellule avec Vic, un héroïnomane, et Hassan, un SDF cambrioleur de bas étage à la santé précaire. Cela fait quelques jours que ce dernier se tord de douleurs dans son lit. Malgré ses demandes de soins répétées, l’administration pénitentiaire fait preuve d’une indifférence coupable. Malheureusement, la situation d’Hassan n’est pas une exception.

Derrière les portes d’acier vit aussi Toufik, un détenu psychotique oppressé par cet environnement pathogène, et Audrey, une surveillante tombée tristement amoureuse d’un détenu. Les quatre contes cruels de Prison dressent le portrait d’un écosystème opaque et inhumain, où privation de liberté rime avec violence, privation de soin, de silence, de vie sexuelle et d’amour.

Avec, au final, un constat sans appel : la détention ne réinsère pas. Elle sanctionne, elle brime, elle humilie, elle favorise le suicide et la récidive. La prison, cette Ogresse, ne protège personne. Elle les déshumanise.

Entre documentaire et roman noir, Prison brosse un portrait au vitriol d’un univers carcéral au-delà de tout cliché.

Postface de la Ligue des droits de l’Homme.


Scénario : 
Fabrice Rinaudo est né en 1976 et vit aujourd’hui à Nice. Grand amateur de polar et de roman noir, il publie son premier livre, en 2013, Liquidez vos idoles. Prison est sa première incursion en bande dessinée.

Dessin : Sylvain Dorange et Anne Royant

Né en 1977, Sylvain Dorange a toujours gribouillé des bandes dessinées dans ses carnets scolaires et composé des morceaux dissonants sur son vieux piano. Aux Arts Décoratifs de Strasbourg, il apprend les codes de la BD, la magie de l'animation 2D, la rudesse du story-board et réalise ses premières musiques de films. Claude Lapointe, illustre professeur, l'encourage à garder une dose de poésie dans son dessin.
Son graphisme restera proche de l'illustration jeunesse dans ses trois adaptations des films de Robert Guédiguian, Les Contes de l'Estaque, chez feu EP éditions (2004 - 2006).
La série Les Promeneurs du temps, éditée chez feu Poivre et Sel (2013 - 2014) et réalisée avec Franck Viale s'est malheureusement perdue dans les limbes du paradoxe temporel et reste en suspens, après trois tomes.
En 2015, le chanteur Sanseverino lui demande de réaliser la pochette de son nouvel album, racontant en chansons les aventures du bagnard Henri Charrière. Le projet devient aussi une BD, 
Sanseverino est Papillon, édité par La Boîte à Bulles, adapté par Cécile Richard, chanté par Sanseverino et dessiné par Sylvain Dorange.
Aux mêmes éditions paraîtra en 2017 La plus belle femme du monde, un biopic sur Hedy Lamarr, star hollywoodienne et inventrice du Wi-Fi, scénarisé par William Roy. En 2018, Sylvain Dorange adapte librement l'autobiographie de son ami Psychotique Jacques Mathis et revient aujourd’hui avec Beate et Serge Klarsfeld, la biographie d’un couple atypique adepte de la désobéissance civile.

Anne Royant est née en 1978 à Nantes. En 2003, elle sort diplômée des Arts Décoratifs de Strasbourg. Illustratrice jeunesse, elle a publié chez Milan Milles ans de contes orientauxBêtes et méchants ou encore Moi, je lis. Artiste polyvalente, elle a également réalisé des court-métrages d’animation – dont Bonjour Docteur sélectionné en compétition au Festival d’Animation de Auch -, et a travaillé en réalisation de décors et accessoires pour de nombreuses productions, dont Arte. Après avoir participé aux albums Histoire incroyables des Jeux Olympiques et AC/DC en BD aux éditions Petit à petit, Anne co-signe avec Sylvain Dorange les dessins de Prisons.


INTERVIEW

Alors que de plus en plus de voix s’émeuvent de voir que notre système carcéral dysfonctionne, Fabrice Rinaudo, Sylvain Dorange et Anne Royant livrent avec Prison, une BD docu-fiction dans laquelle il raconte le quotidien sordide de ceux qui évoluent  au sein de cette micro-société en vase-clos.

Fabrice, vous avez écrit ce scénario à la suite d’une conversation avec une avocate. Tous les personnages proviennent-ils des récits qu’elle vous a transmis ou en avez-vous créé de toutes pièces ?

Fabrice : Le point de départ a effectivement été une conversation avec une avocate préoccupée par le droit des prisonniers en France.
Aucun personnage ne provient directement de son témoignage, qui était plutôt porté sur les aberrations du système carcéral, les conditions de détentions en général. Partant de là, j’ai fait un gros travail de recherche documentaire (livres, témoignages, reportages vidéo, rapport annuel de l’OIP, etc.), pour nourrir les thèmes abordés : surpopulation, absence de droit de travail en prison, difficultés d’accès au soin, suicide…
Ensuite sont venus les personnages. Certains d’entre eux sont issus es échanges que j’ai eus avec deux psychologues travaillant en prison : Patrick et le psychiatre/violeur. Pour Guy (braqueur) et Hassan (cambrioleur) je me suis inspiré d’une seule et même « véritable » personne.
D’autres ont été créés de toutes pièces, mais basés sur le travail de recherche. 

Qu’est-ce qui vous inspire dans l’univers carcéral ? 
Cela témoigne-t-il d’un engagement citoyen ?

Fabrice : Ce qui est certain, c’est qu’absolument tout de cet univers peut inspirer, dans le sens où tout est à remettre en question. Car l’institution prison ne fonctionne pas.
La manière dont les gens sont traités se rapproche plus de la déshumanisation qu’autre chose.
C’est cette volonté de témoigner de cette horreur qui m’a motivé. 
La représentation d’un détenu dans l’imaginaire collectif n’est pas « belle ». La prison, c’est l’exclusion de la société, rien à voir avec la mission de réinsertion présentée dans les discours officiels. J’ai conçu ce livre comme la description d’une réalité sociale qu’on connaît peu.
C’est pourquoi je pense qu’à la manière de certains polars, ce texte se lit comme un roman noir. Déconstruire les préjugés en question en montrant la réalité, c’est sûrement là qu’intervient l’engagement citoyen… 

Sylvain, vous avez illustré plusieurs ouvrages à La Boîte à Bulles. Tous ces projets sont liés par leur dimension biographique. C’est ce qui vous a poussé à accepter celui-ci ?

Sylvain : L’avocate en question est une amie commune, qui voulait que la vérité soit faite sur ce qu’il se passe dans les prisons. Sachant que je faisais des BD engagées à La Boîte à Bulles, elle m’a proposé d’en faire une sur ce sujet, avec de la documentation qu’elle pourrait me donner. J’étais emballé par le projet et j’ai tout de suite pensé à Fabrice pour scénariser la BD. Nous avions quelques projets de séries noires, ce qui collait assez bien à l’univers carcéral.

Sylvain, Anne, les illustrations sont faites à quatre mains, pourquoi avoir choisi de procéder ainsi ?  Qu’est-ce qui vous a poussé à former cette équipe ?

Sylvain : Nous travaillons avec Anne depuis plusieurs années à quatre mains pour le dessin, et quelques fois à deux cerveaux pour le scénario. Ici, nous voulions que la prison soit un personnage à part entière, il lui fallait un corps, une âme. Comment aurait-il pu être mieux incarné que par le dessin de Anne, si particulier ?

Anne : Travailler à deux au niveau du dessin, l’un sur les décors, l’autre sur les personnages permet à chacun de se focaliser sur sa mission, d’aller plus dans le détail mais aussi d’avoir deux univers distincts, réunis ensuite par la mise en couleur. Je travaille au carbone sur papier, Sylvain à la palette graphique, le mélange de ces deux techniques est assez d’actualité, le charme du traditionnel réveillé par le dynamisme des nouvelles technologies… 

Pourquoi avoir incorporé des éléments fantastiques , cauchemardesques dans certaines scènes ?

Fabrice : Pour ma part, c’est simple : la prison est une réalité cauchemardesque, ou un cauchemar réel.

Anne : On s’est un peu projetés dans la tête de certains 
« prisonniers ». Leur privation de liberté et leurs manques de confort, d’affection, de vie de famille, de nature, de sexe, de tout en fait, ajoutés à la répétition des jours qui se ressemblent, aux maladies, aux prises de médicaments et autres drogues ; bref, ce grand bouillon de confusion devait générer pas mal de mal-être. Nous avons tenté de figurer ces perceptions brouillées dans des représentations un peu métaphoriques... 

Résumé :
A travers les trajectoires de quatre prisonniers, une mise en lumière de la manière dont la France traite ses délinquants dans le milieu carcéral. Les acteurs, les mécanismes et les paradoxes de l'institution privatrice de liberté sont évoqués pour aboutir à la conclusion que cette approche de la délinquance ne permet pas la réinsertion tout en brisant physiquement et psychiquement les individus.